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La gauche en Inde (I) : la révolution naxalite

jeudi 30 octobre 2008 par CEPRID

Alberto Cruz

CEPRID

traduit par Danielle Bleitrach pour http://socio13.wordpress.com/

L’année prochaine, au mois de mai, il va y avoir des élections générales en Inde, un pays de plus de mille millions d’habitants et qui vient de signer un accord nucléaire avec les Etats-unis qui le situe, sans équivoque, dans l’orbite occidentale. Une vieille apiration de l’oligarchie indienne qui dans les dernières 19 années s’est traduite par l’imposition de politiques néolibérales, en démantelant peu à peu une économie jusqu’alors centralisée et en privatisant les secteurs principaux. En accord avec cela, et dans une tentative, pour renforcer cette avancée vers l’occidentalisme, l’Inde a noué des accords militaires avec Israël (ce qui a provoqué un essor de l’islamisme qui s’est traduit par des attentats dans toutes les villes du pays et par des attaques contre d’autres confessions religieuses, spécialement contre les chrétiens, dans des états comme Orissa) et est à l’étude la manière de “congeler” l’accord de construction d’un pipe-line de gaz avec l’Iran.

C’est, donc, une année cruciale pour la gauche indienne, très forte et avec des responsabilités de gouvernement dans des états comme le Bengale Occidental,le Kerala,le Minipur, le Tamil Nadu et dans le Tipura (l’ensemble recouvrant environ 220 millions d’Indien au total, presque le quart de la population du pays), tous gouvernés par le Front de la gauche sous l’hégémonie du du parti communiste de l’Inde (marxiste). Mais on assiste aussi en Inde à l’essor, de plus en plus fort, de l’insurrection naxalita (1* - Il est recommandé la lecture de l’article qui apparaît dans le lien de cette note pour connaître le processus révolutionnaire en Inde-), été à la tête par le Parti communiste de l’Inde (maoíste) et son bras armé, l’Armée Populaire Guérillera du Peuple. Il existe une autre organisation, de surcroît, une guerrilla impulsée par le Parti communiste Marxiste - léniniste la Guerre Populaire. Ces deux organisations ont lancé un appel au boycott des élections.

Les naxalites se sont convertis en un mouvement politique d’importance nationale. Ils agissent dans 14 (15 selon la carte du CADH) des 28 Etats de l’Inde (Chhattisgarh, Jharkhand, Uttar Pradesh, Asma, Uttaranchal, Kerala, Tamil Nadu, Bengala Occidental, Gujarat, Andhra Pradesh, Madhya Pradesh, Orissa, Maharashtra y Bihar) et ce qui, en chiffres,signifie que dans 182 districts sur un total de 602 dans lesquels est divisé administrativement le pays, ce sont les maoïstes qui contrôlent la situation(2). Il faut faire remarquer qu’en avril il était considéré ils étaient actifs dans 165 districts (170 comme du CADH), alors qu’aujourd’hui ils sont actifs dans 17 districts de plus ce qui indique clairement une progression imparable qui à lieu non seulementdans les campagnes , mais qui commence à s’étendre aux villes, spécialement aux zones ouvrières et industrielles de Dheli, de Mumbai, de Raipur, de Pune et de Jammu en alternant les actions de propagande avec les militaires. Le gouvernement indien lui-même considérait qu’en un an entre 30% et 35% du territoire de l’Inde était passé sous le contrôle des naxalites(3), pourcentage qui serait encore majoré aujourd’hui.

Les succès révolutionnaires dans les campagnes sont indiscutables : ni la police, ni les fonctionnaires de l’Etat n’osent entrer dansBastar, une zone étendue de l’état de Chhattisgarh d’environ 100.000 kilomètres carrés (4), et ses actions contre les paramilitaires de Salwa Judum (qui se traduirait comme “Chasseurs de la paix”, armés par les propriétaires fonciers et le propre État qui leur offre, de plus, une solde) provoquent la démoralisation et la désertion de ces mercenaires aussitôt qu’un combat se produit tant ils subissent de pertes répétées. Le périodque “Indian Express” relatait d’une manière crue comment après une attaque maoísta qui a causé 55 morts à une force composée de policiers et de paramilitaires en se faisant l’écho d’un rapport officielqui rapportait les événements : “la lâcheté, la désertion, la dépendance excessive des employés de police par rapport à la Police Spéciale Locale [les paramilitaires de Salwa Judum qui entrent dans la catégorie d’agents policiers ruraux], l’absence d’un entrainement approprié et la consommation de substances toxiques ont été la cause de l’assassinat des 19 policiers et des 39 PEL [Salwa Judum]”.Pour minimiser un peu l’effet de l’échec, le rapport notait que la dite attaque avait été effectuée par une force de “au moins 400 naxalites” (5). Bien que ce fut, jusqu’à cette date, l’attaque ayant le plus grand nombre de morts, constamment il y a des pertes parmi les policiers et paramilitaires, en incluant les commandos d’élite d’Andhra Pradesh, dénommé des “Lévriers”, qui a subi le juin, passé 38 pertes mortelles lors d’une attaque du bateau dans lequel ils s’apprétaient à réaliser une opération militaire contre un campement maosite. (6)

Les naxalites sont passés de la guerre de guérillas à celle-là de mouvements, avec une plus grande accumulation de forces et en suivant le schéma classique maoíste de “dix contre un, un contre dix” c’est-à-dire obliger les forces étatiques, que ce soit l’Armée ou la Police, à assumer une position défensive tactique - qui est facilement attaquable sur la base de la supériorité de forces - pour, grâce à ces coups militaires, les obliger à prendre par la suite une position défensive stratégique, ou bien, l’immobilité et la concentration de forces dans un seul un point pour défendre une ville ou un territoire. On peut affirmer que la guérilla naxalita met en oeuvre des brigades qui peuvent comprendre jusqu’à 300 combattants. Si l’on doit en croire la presse indienne, les attaques contre des stations de police, des locaux des paramilitaires, des entreprises minières, des chemins de fer, des stations de télécommunications, des constructions électriques et, même, des assauts dans les prisons - en décembre 2007 ils ont attaqué la prison de Raipur, la capitale de Chhattisgarth, en obtenant que 299 prisonniers puissent s’enfuir, avec parmi eux une centaine de guérilleros – sont le fait de groupes d’environ 40 à 150 combattants qui parfois atteignent même 400. Cependant, cela ne veut pas dire que les naxalites entretiennent de manière permanente de grandes formations guerrilleras, mais qu’elles se constituent en fonction de la stratégie.

Les données sont éclairantes : en 2007 les naxalitas ont réalisé 8.488 attaques contre des établissements policiers dans 91 districts de 11 états, selon unrapport présenté par le Ministre de l’Intérieur Sriprakash Jaiswal, devant le parlement indien (Lok Shaba,Chambre du peuple) (7). Et la guérilla commence à chercher la complicité des policiers, elle leur lance des appels pour qu’ils rejoignent leurs rangs s’ils ne veulent pas continuer de subir leurs assauts militaires. Depuis un juin 2007, chaque fois qu’une attaque est réalisée contre un établissement policier les guerilleros laissent sur place des pamphlets où l’on peut lire “Tu luttes pour empêcher le soulévement du peuple, parce que ta vie est en jeu, parce que le peuple celui que tu tues appartient à ta propre classe. Lève-toi contre le système” (8). Il faut indiquer que l’Armée, en tant que telle n’est pas impliquée dans la lutte avec les guerilleros même si certaines de ses unités d’élite ont participé aux opérations sur le terrain contre la direction naxalite.

La situation est arrivée à un tel paroxysme que le gouvernement qui déja considérait depuis un certain nombre d’années que l’insurrection maoïste comme le principal problème de l’Inde a décidé de mettre en marche un plan pour contenir l’avancée de la guerrilla : commencer un programme de développement des zones les plus pauvres de l’Inde, modernisation de la Police, création d’infrastructures routières qui servent aussi bien aux populations qu’à faciliter le transport rapide des forces de police et la création de six écoles de guerre, c’est-à-dire la formation d’unités antiguérrillas pour pouvoir attaquer et détruire les campements naxalites dans la jungle. L’idée du gouvernement est de créer quelques bataillons spéciaux pour la lutte contre la guerrilla qui comprendraient des effectifs de 14.000 soldats et sur plan il apparaît qu’avant la fin de l’année il devrait y en avoir a deux ou trois d’opérationnels (9). Actuellement, la Force Centrale de Réserve de la Police unie aux paramilitaires de Salwa Judum, sont les principaux protagonistes de la lutte contre les maoístes : elle dispose de 201 bataillons, dont 32 sont déployés dans les zones où opèrent les naxalites (10) mais ils ont fait preuve d’une rare inefficacité et ils reçoivent à chaque fois avec plus de fréquence massive des coups sur le plan militaire, c’est pourquoi il a été décidé maintenant la création des bataillons antiguerrilla dans le style du tristement célèbre Batallón Atlacalt de El Salvador, qui a perpétré d’innombrables tueries dans les zones rurales de ce pays de l’Amérique centrale.

Le grand bond en avant

Jusqu’à maintenant la guérilla ne s’occupait pas des villes pour se concentrer sur le contrôle totaldes campagnes , en suivant la vieille stratégied’encercles les villes à partir des campagnes. La stratégie est de pénétrer dans les aires rurales, de se consolider dans celles-ci et, dès que les bases d’appui peuvent être considérées comme sûres, il s’agit établir des coordinations efficaces et effectives entre différentes cellules dans d’autres États. Cela a donné des résultats parfaitsau Nepal. De la même manière que leurs camarades Népalais, les maoïstes indiens respectent les fonctionnaires locaux- y compris les policiers- si le peuple considère qu’ils sont honnêtes et ne sont ni corrompus, ni représsifs. De la même manière ils respectent les entreprises qui sont installées sur leurs zones d’influence, mais les taxent d’un “impôt révolutionnaire”, qui oscille entre 15 et 20% de leurs bénéfices, avec lequel ils financent leurs activités. Mais au contraire, les naxalites sont implacables dans leur lutte contre les Zones Economiques Spéciales (ZEE) qui ont été créé par le gouvernement central, avec l’appui des gouvernements des Etats, pour établir des industries, y compris de métallurgie et de minerais, et qui sont en train de provoquer le déplacement de leurs foyuers de dizaines de milliers de ruraux, qui par conséquent sont en train de perdre leurs moyens d’existence. L’énorme majorité des déplacés sont des métayers sans terre, des artisans et petits commerçants, issues des communautés défavorisées de dalit et adivasi et de minorités religieuses. (11).

Précisément le travail avec les dalits, les intouchables dans le système des castes et les parias en Inde , est au centre du travail politique de la guerrilla naxalite, selon les décision de son IX e Congrès , qui a eu lieu en janvier 2007.. Cette décision a été à l’origine de l’expansion de la guerilla dans toute l’Inde. Ce Congrès a décidé, de surcroît, comme axe central du travail politique et militaire l’extension de la guerre populaire à tout le pays, “l’appui aux luttes nationales contre l’expansionnisme indien” au Cachemire et Jammu, l’expansion du mouvement vers les villes pour avoir une présence dans les masses urbaines, appauvries, et la classe moyenne dans le but “d’obtenir un mouvement massif contre les politiques neoliberales” et, par conséquent, la lutte contre les Zones Économiques Spéciales qui ont été créées dans dernières années en Inde et quiont provoqué en conséquence, “la dislocation des petites industries et des commerçants, qui ont été poussés à la banqueroute par l’offensive massive des compagnies impérialistes transnationales et des importateurs-bureaucrates-bourgeois” et qui sont qualifiées de “enclaves néocoloniales” (12).

L’entrée dans les villes est “le grand bond en avant” des maoïstes indiens. On constate la présence de cellules naxalites dans les zones ouvrières et industrielles de Delhi, Mumbai, Raipur, Pune et Jammu. Bien que pour le moment l’activité principale soit la de propagande, dans quelques zones où le mouvement naxalite est spécialement fort des actions militaires sont déjà menées. C’est le cas de Nayararh, l’une de villes les plus importantes de l’état d’Orissa, où un commando naxalite a réalisé l’une de ses actions les plus audacieuses jusqu’au moment : le 16 février de cette année s’est produit l’assaut d’un commissariat de police et la réquisition de 1.069 armes qui se trouvaient dans cette caserne policière. Le gouvernement indien a donné seulement le chiffre mais pas les caractéristiques des armes capturées, ce qui indique que désormais la guerrilla a désormais en son pouvoir un matériel plus sophistiqué , comme cela a pu être constaté dans les dernières opérations militaires où des installations policières ont été bombardées avec mortiers de 80 millimètres et des lance-grenades sont utilisées pour l’attaque des convois de véhicules policiers et paramilitaires.

La pésence naxalite dans les cités et les centres industriels a apporté un daut qualitatif à la guerre populaire porlongée. Depuis la seconde moitié de 2007 les naxalites ont privilégiés leurs actions contre les Zones Économiques Spéciales dans une frange qui comprend les villes de Bhilai-Ranchi-Dhanbad-Calcutta, d’un côté, et de Mumbai-Pune-Surat-Ahmadabad de l’autre, dans le même temps où ils imposaient d’une manière inégale des blocus dans les zones où ils ont une force la plus grande comme c’est le cas dans les états de Jharkhand, d’Orissa, de Chhattisgarh et du BengaleOccidental et dans ceux où ils en ont moins comme en Haryana et dans le Punjab. Dans le Bengale Occidental, un Etat gouverné par la gauche, la ZEE prévue a dûe être suspendue après une révolte populaire dans les campagnes, qui forte de l’appui maoíste, qu’elle a été étouffée par le sang et le feu. Ce fait a provoqué un discrédit terrible de la gauche traditionnelle, donc a été favorible à l’insurrection naxalite qui a vu les paysans pauvres s’incorporer en massedans ses rangs. A ce sujet, ainsique d’autres semblables, il sera traité dans la deuxième partie qui aborde la situation de la gauche indienne.

En Inde il y a en ce moment 40 ZEE en fontionnement et le gouvernement central a calculé que cette année 2008 elles atteidront un volume d’affaire supérieur aux 27.000 millions de dollars en biens, services et marchandises. Au total, le gouvernement a prévu d’approuver 339 ZEE et dit que cela fournira de l’emploi direct à 800.000 personnes. Les ZEE sont des aires qui, grave aux dégrévements discaux qui font que les entreprises ne payent aucun impôt, jouissent d’avantages fiscaux et économique pour favoriser la ,productivité et où peuvent être aboli la législation normale du pays en matière du droit du travail, du respect de l’environnement avec l’objectif d’attirer les investisseurs locaux et étrangers.

Le succès politique joint au militaire

Les succès militaires des révolutionnaires indiens sont accompagnés d’un succès politique démontrable dans les zones sous leur contrôle, où est réussi une effective amélioration du niveau de vie de la population, à la base rurale, et ils sont en situation d’offrir une alternative à la gauche traditionnelle et réformiste. Ce qui est en train de provoquer que certains secteurs des intellectuels indien voient avec plaisir et sympathie la guerrilla, comme c’est le cas de de Arundhati Roy, qui se refuse à qualifier leur lutte d’immorale ou terroriste. Ou comme le célèbre musicien Ravi Shankar, qui a déclaré publiquement que les maoïstes sont “admirables”.

Depuis que les naxalitas, ont commencé à réaliser un travail politique dans les villes, parmi les pauvres urbains, les habitants des quartiers marginaux et la classe ouvrière organisée, et spécialement après le massacre de paysans ordonnée par le gouvernement du Bengale Occidental - gouverné par le Front de gauche sous l’hégémonie du Parti communiste de l’Inde (marxiste) - en mars 2007 quand ils s’opposaient à la ZEE prévue dans Nandigram, les voix pour que les dirigeants maoïstes prennent la tête d’un autre front de gauche en Inde, de caractère réellement révolutionnaire, s’élèvent avec toujours plus de force. Elles réclament “une nouvelle dynamique dans la propagande”, une plus grande attention aux “non initiés à la politique” et “une plus grande attention aux classes moyennes”.

Les maoístas sont encela, conscients que le progrès de leur guerre populaire prolongée dépend de la création d’une plate-forme culturelle et politiquement différente de celle qui a existé jusqu’à présent en Inde – et spécialement en ce qui concerne la séparation des castes, l’oppression féodale de la famille et des coutumes- et, surtout, loin des allées du pouvoir qu’affectionne tant la gauche traditionnelle.

Notes :

(1)Alberto Cruz, “India, entre la euforia nuclear y la insurrección naxalita” http://www.nodo50.org/ceprid/spip.php ?article267

(2)The Hindu, 23 de agosto de 2008.

(3)The Tribune, 7 de agosto de 2007.

(4)The Pioneer, 19 de agosto de 2008.

(5)Indian Express, 1 de septiembre de 2007.

(6)Asian Age, 29 de junio de 2008.

(7)Indian Times, 3 de diciembre de 2007.

(8)The Hindu, 13 de febrero de 2008.

(9)Asian Age, 17 de julio de 2008.

(10)Prensa Latina, 4 de febrero de 2008.

(11)Les dalit sont les intouchables dans le système de caste, les adivasi sont des peuples indigènes, et les minorités religieuses sont fondamentalement islamiques.

(12)Parti Comuniste de India (maoíste),février 2007.

Alberto Cruzest journaliste,politologue et écrivain, spécialement dans Relations Internationale.

albercruz@eresmas.com


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