CEPRID

Défis concrets de la lutte contre le « grand Moyen Orient »

lundi 18 juin 2007 par CEPRID

Ali Gharib CEPRID 18 -VI -07

I. Le « Grand Moyen Orient »

La situation qui prévaut dans la région arabe est une situation très dangereuse et très tendue. Cette situation n’est pas nouvelle, il est vrai : elle a commencé dès 1948, à la suite de la résolution 194 des Nations Unies qui a permis la création d’Israël, après avoir décidé la partition de la Palestine et chassé la majeure partie de son peuple.

Cependant, la principale raison d’une telle situation, depuis 2003, est la présence massive de l’armada étasunienne et de l’OTAN dans notre région sous le prétexte futile de nous « sauver » des dictatures et du terrorisme, que les Etats-Unis ont soutenus ou créés, et de nous aider à construire une société soit disant « démocratique ».

« Le Grand Moyen Orient », que l’Administration de Georges Bush voudrait nous imposer, se résume, dans la théorie du « chaos constructeur ».

Cette théorie, basée sur le plan mis au point dans les années 70 par Henry Kissinger (et développé depuis) consiste en une partition de nos pays et de nos peuple en mini Etats confessionnels et ethniques qui se feraient la guerre tandis que les grandes compagnies pétrolières étasuniennes nous volent les richesses dont notre terre recèle. Et comme l’armée israélienne ne suffit plus à contrôler militairement ce projet, et comme les régimes arabes, amis des Etats-Unis, sont branlants, il fallait trouver une autre solution : recourir à l’occupation directe de l’or noir et du gaz, puisque qu’ils continueront à constituer les sources d’énergie du XXIe siècle et, pour ce faire, s’aider d’un prétexte, « le terrorisme », que les Etats-Unis eux-mêmes avaient développé à un certain moment contre la présence de l’Union soviétique et afin de mieux contrôler le monde arabe si les régimes amis venaient à disparaître…

Telle est, donc, la cause première et essentielle de toutes les guerres d’agression qui se sont déroulés contre nous, depuis la création d’Israël et l’éloignement forcé du peuple palestinien hors de son pays.

Et telle est la cause des nouvelles guerres que les Etats-Unis des Bush, père et fils, en Irak, en Palestine et, bien entendu, au Liban. Sans oublier les menaces qui pèsent toujours sur nous, depuis l’échec de l’agression de l’été dernier à réaliser ses objectifs politiques, à savoir : mettre fin à la résistance du peuple libanais, et non seulement du Hezbollah, et à sa revendication concernant la libération des fermes de Chebaa et des hauteurs de Kfarchouba, points stratégiques et économiques très importants. Sans oublier, bien sûr, la solidarité avec le peuple palestinien dans sa lutte pour obtenir son droit de recouvrer sa terre et aussi avec le peuple irakien en lutte pour l’indépendance de son pays, le retrait des troupes d’occupation et l’arrêt du cycle de violence auquel il est soumis.

II. Un parti nouveau

Ou une nouvelle « internationale » de gauche ?

Si je rappelle très brièvement la situation qui prévaut dans notre région et, particulièrement, dans mon pays, c’est parce la vision d’une organisation quelconque doit prendre en considération, dans son évolution, les objectifs qu’elle doit accomplir ou aider à accomplir, mais aussi l’étendue de la tâche qu’elle aura à accomplir, tant à l’intérieur d’un seul pays ou dans une région si importante.

De plus, et en prenant l’exemple de la lutte et de ses besoins dans notre région, je pense que je pourrai mieux exprimer notre conception sur les partis (ou organisations) politiques qui doivent prévaloir, aujourd’hui, à la suite de la chute de l’Union soviétique et de la nouvelle étape de la mondialisation néo-libérale, tant sur le Premier monde que sur notre Tiers-monde.

De plus, il me faut ajouter qu’une formation politique doit changer ses outils de travail et de lutte selon les priorités qu’elle s’est fixées à chaque tournant essentiel ou selon les nouveaux développements, surtout s’ils sont aussi dangereux que ceux vécus par notre pays et notre région, menacée, une fois de plus, et à cause de la situation en Irak, d’une nouvelle agression, limitée (dit-on), tant au Liban qu’en Palestine et en Iran parce que Georges Bush n’est pas encore prêt à tirer les leçons nécessaires ce qui veut dire, comme sa ministre des Affaires étrangères, Condoleeza Rice l’a si clairement exprimé, qu’il est possible qu’il mette la région à feu et à sang dans sa volonté de créer le « Nouveau Moyen Orient » soumis à sa volonté…

Cette globalisation de l’offensive impérialiste doit être repoussée par une coalition vaste, tenant compte des forces mises au service du Nouveau régime mondial, à savoir : l’OTAN, en plus de l’autorité des Nations Unies et du terrorisme d’état…etc.

Sur quelles bases, voyons-nous se définir cette coalition ?

Sur deux bases essentielles :

La première est la lutte contre le projet de mainmise impérialiste sur la région, à partir d’une entente politico-économique qui garantirait une meilleure répartition des richesses et, par suite, une meilleure participation des forces vives arabes à cette lutte.

La seconde est l’élaboration d’un projet de changement démocratique dans chacun des pays de la région ayant pour fondement des réformes politiques et socio-économiques profondes, dont le but final serait d’assurer une certaine égalité des chances et une meilleure représentativité menant à la création d’alternatives nouvelles, et non seulement d’alternances dans le pouvoir.

En d’autres termes, il est nécessaire d’œuvrer dans le sens d’un retour à des alliances entre partis et groupes de la gauche anti-libérale, de manière à donner un nouvel élan à cette gauche qui a cédé sa place, à la suite de la chute du mur de Berlin, tant dans la lutte de libération nationale que dans la lutte de classe, à des forces religieuses ou confessionnelles (musulmanes, surtout) qui, au nom des principes que la gauche avait brandis dans les années Cinquante, tiennent le haut du pavé du combat anti-impérialiste et récoltent les suffrages des pauvres et des déshérités.

Cela ne veut pas dire que la gauche ainsi reconstituée doit nécessairement avoir des différends avec ces forces antiimpérialistes et anti-mondialistes.

Il est bien sûr nécessaire d’avoir une entente avec elles, mais sur les bases d’un programme et d’un rassemblement où la gauche aura son mot à dire clairement.

Si nous prenons le cas du Liban, nous disons qu’il y a un large terrain d’entente entre le Hezbollah et les partis de gauche, dont en particulier le Parti Communiste ; et cela sur plus d’un point : la lutte contre le nouveau projet impérialiste étasunien pour la région, l’application du droit au retour du peuple palestinien (dont plus de 350 000 vivent au Liban), la préservation de l’intégrité et de la souveraineté du Liban dans ses frontières reconnues, dont les fermes de Chebaa et les hauteurs de Kfarchouba… Cependant, la lutte nationale et patriotique ne fait pas, à elle seule le poids. Le changement demande d’autres assises de classe, mais aussi la démocratie et le refus de tout regroupement sur des bases confessionnelles qui peuvent faire éclater l’unité du pays à tout instant.

Nous avançons cet exemple du Liban, parce que certains groupes de gauche ont vu, à tort, que le Hezbollah peut avoir des points communs avec « la théologie de la libération » en Amérique latine.

Nous pensons que les partis ayant des idéologies confessionnelles sont incapables de faire des changements radicaux dans nos sociétés comme ils sont incapables de préserver les victoires acquises sur les agresseurs (étasuniens et autres) qui tentent de mettre la main sur nos pays. D’ailleurs, les « salafistes », tel Ben Laden par exemple, n’ont-ils pas, à des moments historiques, pactisé avec l’administration étasunienne dans sa lutte contre l’Union soviétique et les pays socialistes ? N’étaient-ils pas considérés comme des « moudjahiddines », des militants pour la cause de la « démocratie étasunienne » dans le monde ?

C’est pourquoi nous appelons à l’union de la gauche dans chaque pays, dans laquelle les partis communistes et ouvriers pourront jouer le rôle de catalyseur. Sur le plan arabe, nous voyons qu’il devient de plus en plus pressant de créer une certaine forme d’association alter mondialiste.

Mais cela serait insuffisant si nous ne pensons pas à élargir nos alliances à toutes les forces, à tous les groupes ayant comme point de mire la démocratisation du monde arabe.

Donc, ce que nous recherchons, c’est une alliance large mais basée sur un programme minimum de changement. Une alliance large, mais non vague. Une alliance où la gauche pourra tenir le haut du pavé. Une alliance en commun accord avec les mouvements des peuples et de la classe ouvrière internationale.

Une nouvelle internationale, en somme. Mais plus ouverte et plus démocratique.

Ali Gharib est Membre du Bureau politique du Parti Communiste Libanais


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